Les gammes

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Les débuts d’un musicien semblent ingrats : l’apprentissage d’une nouvelle technique, des exercices répétitifs, des fausses notes inévitables, l’impossibilité de pouvoir jouer un air que l’on aimerait savoir déjà jouer… de quoi rebuter même les plus motivés.

Dans le “Carnaval des animaux”, Camille Saint-Saëns dédie d’ailleurs un morceau plein d’humour aux “pianistes” qui font leurs gammes en les comparant à des animaux, au même titre que les autres invités de son Carnaval : l’Eléphant, le Cygne ou les Hemiones. Sur la partition du morceau “Les pianistes”, il a ajouté l’indication “avec hésitation et maladresse”… mais les pianistes professionnels semblent réticents à suivre cette indication, puisqu’on entend souvent des interprétations trop propres. J’aime beaucoup celle-ci, que j’imagine plus proche des voeux de Saint-Saëns :

Les gammes et les “études”, ces morceaux de musique spécialement composés pour perfectionner un point technique particulier, semblent un passage obligé dans l’apprentissage des jeunes musiciens et dans l’entretien de la technique de tous les musiciens, quel que soit leur âge et leur niveau. Un mal nécessaire, en quelque sorte.

Et pourtant. Certains grands musiciens avouent n’avoir jamais fait ni gammes ni études, et avoir toujours pratiqué leur technique sur de grands morceaux du répertoire dont ils choisissent un passage précis. Et un très grand violoncelliste, Pablo Casals, jouait chaque matin le même menuet de Bach, pour réveiller ses doigts et son violoncelle.

Ou alors, il y a les exercices quasi obsessionnels de Schradieck pour les violonistes et altistes… qui par la répétition des mêmes mouvements de doigts visent à muscler et échauffer sans nécessité de réfléchir, un peu comme on échauffe des muscles avant un entraînement sportif. Et ces exercices ne sont forcément désagréables, finalement, surtout si on est légèrement obsessionnel ;)

Et en entreprise ?

Quelles sont nos “gammes”, dans notre travail quotidien ? Quelle est la part un peu répétitive rébarbative et néanmoins nécessaire de notre travail, et de quelle manière l’aborde-t-on ? On peut probablement choisir de le voir comme un exercice presque plaisant de reconnexion à son ouvrage, ou comme un mal nécessaire dont on souhaite se débarrasser rapidement.

Et on peut probablement choisir aussi de quelle manière on s’échauffe. Par le “morceau de concert” dont on sélectionne un court passage, ou par les exercices dédiés à la manière d’un Schradieck.

Et vous, quelle est votre manière de faire des gammes, de vous échauffer en entamant la journée de travail ? A quel moment en faites-vous et combien de temps y accordez-vous ? Ou bien faites-vous un métier qui ne nécessite aucune gamme, et dans ce cas qu’est-ce que cela révèle de votre métier ou de votre façon de l’envisager ?

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